mardi 7 août 2012

 
Alberta - Jasper & Banff National Parks (1)

Durant la nuit, on a droit à un orage apocalyptique comme la montagne peut nous en produire. Le boucan est d'enfer et le sol tremble. Dans ma petite tente, c'est très impressionnant. Comme Angela et Marco partent dans la même direction que moi, on démarre ensemble vers Jasper au moment où les nuages s'écartent pour laisser passer le soleil. La route est de plus en plus belle. On avance dans une vallée entourée de pics qui ont tous l'air plus hauts les uns que les autres. Quel changement de décor par rapport à ce que j'ai vu jusqu'ici! Et tellement soudain!


En fin de journée, nous franchissons le col de Yellowhead à 1131 m. Ce col est symbolique pour moi à plusieurs titres puisque c'est là qu'on quitte la Colombie Britannique pour entrer en Alberta, j'atteins les 2000 km parcourus depuis le début du voyage, on change de fuseau horaire et le vélo en altitude va commencer. Ca fait déjà un bon petit bout de chemin, tout ça!


Pendant notre descente vers Jasper, nous sommes arrêtés à un contrôle car on entre maintenant dans les parc nationaux de Jasper et de Banff, et il faut payer 10 dollars par jour. Le type nous demande combien de jours on compte rester dans les parcs. Qu'est-ce que j'en sais, moi, combien de jours je vais y passer? J'ai une tête à faire un planning? Ca nous emmerde profondément de devoir décider de ça, plus par principe qu'autre chose, même si le prix n'est pas donné. Tellement de paramètres peuvent entrer en compte, sachant que la route s'étire sur 300 km en montagne. Ce n'est pas comme si on était en voiture! Après 30 minutes de concertation et de discussion avec le gars, il nous révèle enfin qu'il n'y a pas de contrôle à la sortie... J'ai un peu l'impression qu'il ne voulait pas tout nous dire, histoire de nous faire payer le prix fort et qu'on l'a eu à l'usure. Je lui dis alors avec un clin d'oeil qu'on va tout traverser en un jour. Et là, c'est notre chance, on a affaire à un idiot. Au lieu de prendre la blague pour ce qu'elle vaut, il se rengorge comme un paon et nous dit fièrement: "Et là-bas, on ne me la fait pas à moi! Je suis un grand cycliste. Je roule beaucoup. Je sais que c'est impossible en un jour!" Sans blague, gros malin... "Vous me diriez trois jours, je sais que c'est possible car je sais le faire et je roule beaucoup!" On saute sur l'occasion: "OK alors, si vous êtes d'accord pour 3 jours, on les prend." Et le gars accepte, fièrement persuadé de ne pas s'être fait rouler. Ce que son orgueil lui a empêché de prendre en considération, c'est qu'on est chargé comme des mulets et qu'il nous faudra au moins 5 jours. Mais il est content et nous encore plus. Parfait!

Nous arrivons ensuite à Jasper, qui est une petite ville hyper touristique. A l'information, on nous prétend avec agacement que tous les campings sont complets, d'autant plus qu'on est samedi. Ils n'en ont rien à foutre qu'on soit à vélo, ici on est submergé de touristes et il n'y a pas moyen de faire jouer la corde sensible. On est presque expédié comme des malpropres. On passe alors presque une heure à téléphoner à des B&B, mais ils affichent tous complet. Je suggère du camping sauvage, mais des grizzlies on été signalés tout près d'ici. On décide finalement d'aller quand même voir au camping et, dans le pire des cas, de camper juste à ses abords. Mais arrivés là, la gentille et jolie demoiselle, qui adore la Belgique, nous dit qu'il reste évidemment toujours des places pour les gens non motorisés. Merci le centre touristique! Tout s'arrange, c'est parfait, et on partage à nouveau l'emplacement, ce qui nous permet de réduire les frais et surtout de rester ensemble. J'avais profité de notre passage par Jasper pour faire le plein de légumes et mes quotidiennes simples pâtes au thon se transforment en de succulentes pâtes au thon et aux légumes. Un festin! Un rien me ravit. A la tombée de la nuit, on sent qu'on est monté en altitude car il fait bien plus frais et un brouillard s'élève dans le bois où nos tentes sont plantées. Sachant qu'un grizzly a été vu à l'entrée du camping ce matin, ça fait vachement glauque et on ne s'attarde pas trop sur le chemin de la douche.

Voici ce qui nous attend les prochains jours. Je suis très impatient!


Jasper - Jonas Creek

Première journée de la traversée du parc. J'ai hâte de voir ce que c'est car j'en ai beaucoup entendu parler. Je n'avais d'ailleurs à la base pas prévu de passer par ici, mais le couple rencontré à Denali m'avait vivement encouragé à le faire et j'avais donc modifié ma route en conséquence. Angela et Marco sont partis avant moi car ils veulent faire un retour en arrière de 30 km aller et retour pour voir un canyon. Moi, étant crevé et comptant sur mes prochaines semaines dans les Rocheuses pour en voir d'autres, je préfère dormir plus longtemps. On se rejoindra au camping ce soir. Je pars donc seul pour 80 km d'ascension lente et progressive dans une vallée magnifique. Certaines côtes sont assez impressionnantes car elles sont en ligne droite et semblent interminables. De plus, même si je n'ai pas vraiment mal aux jambes, elles manquent d'énergie suite à notre fameux "jour de repos", qui a bien entendu attendu le surlendemain pour se faire sentir. Mais c'est de plus en plus beau à mesure que je m'élève et m'enfonce dans la nature.








J'arrive à 19h30 au camping où mes deux amis me rejoignent une heure après. Vu qu'on se trouve dans un parc national, les campings appartiennent à l'Etat, ce qui signifie qu'ils sont rudimentaires, comme j'ai connu en Alaska. On ne dispose ainsi que d'un emplacement avec un banc, de toilettes qui sont juste un pot en plastique au-dessus d'un trou rempli de merde et d'un robinet d'eau potable. Il n'y a bien sûr pas de douches et c'est là que je me félicite d'avoir le réflexe de toujours remplir toutes mes gourdes d'eau. En effet, je tente le ruisseau en guise de bain, mais j'ai à peine mis les pieds dedans que j'ai l'impression qu'un étau se referme sur eux et je bondis hors de l'eau en me les frictionnant. Pareil pour l'eau du robinet qui est en fait relié audit ruisseau glacé. C'est donc là que mes gourdes entrent en action. Il m'en reste une remplie dans laquelle l'eau a eu le temps de se réchauffer pendant la journée. Bon, je devrais plutôt dire se tiédir, mais ça le fait et je peux prendre ma gourdouche sans trop cailler. De plus, nous sommes maintenant à 1500 m d'altitude, ce qui rend les soirées et les nuits fraîches.

Jonas Creek - Rampart Creek

Deuxième jour. Journée importante puisque c'est aujourd'hui que notre premier col à 2000 m nous attend. Ce sera une grande première pour moi car je ne suis jamais monté au-dessus de 1500 m à vélo. Encore une fois, le paysage ne fait qu'embellir et je comprends pourquoi on m'avait tellement recommandé de passer par ici. Toujours écouter les avis positifs! C'est un principe que j'ai appris, on n'est jamais déçu. En contrepartie, ne jamais écouter les avis négatifs. Si tu tiens absolument à voir un truc que des gens te disent de laisser tomber parce que c'est nul, ne les écoute pas et fais-le. Depuis le début, quand on me disait qu'une portion de route allait être chiante ou nulle, je l'abordais avec appréhension et m'étonnais toujours d'apprécier. Il suffit que le temps ait été mauvais ou que le gars ait eu un coup de mou la veille au pieu, et son jugement est faussé. Et puis, certains sont tellement difficiles à contenter, qu'il vaut mieux se faire son propre avis.
 

 
L'ascension se passe comme une fleur, j'ai les jambes en super forme. Avant d'atteindre le col, on accède d'abord à un plateau qui s'étend à perte de vue et sur lequel on peut voir ces immenses glaciers descendre des sommets. On se croirait sur la Lune! Pédaler dans un paysage pareil est surréaliste et je prends un pied magistral. Quel bonheur d'être parvenu ici à vélo!




 


Avant de continuer notre route jusqu'au col, on s'arrête dans le resto à touristes du lieu car on a la dalle. Grand bien nous en prenne! En effet, après avoir commandé un burger a priori dégueulasse mais que l'on trouve succulent tellement on a besoin de manger et encore manger, le ciel s'obscurcit soudain, et 20 minutes plus tard, il pleut et on ne voit plus rien à 20 mètres. On reste assis là deux heures en attendant que la tempête passe et je pense que ce moment fut le début d'une belle amitié entre nous trois car on n'a pu que passer notre temps à raconter des conneries, à se moquer des gens, bref à bien se poiler. On en profite également pour faire le plein de sachets de sucre, de sel, de poivre, de moutarde, etc, en poignant discrètement dans les présentoirs. Dès que l'averse est passée, le soleil revient en force et on peut continuer notre route. La température a vachement chuté et les gants sont maintenant de rigueur. Le coupe-vent aussi, mais après quelques coups de pédales, j'ai à nouveau chaud et je dois l'enlever. Mais juste avant de partir, la photo de touristes!


On y est, on atteint le col de Sunwapta à 2035 m. Félicitations et satisfaction sont au rendez-vous et on s'offre une séance photos sur le monument qui symbolise le col et la ligne de partage des eaux entre le Pacifique et l'Atlantique.



Avant de s'offrir la descente, on prend une heure et demie pour monter à pied en haut d'une montagne et pouvoir admirer l'immense panorama ainsi qu'une magnifique vallée cachée derrière. Impressionnant! Où qu'on regarde, on ne peut que s'extasier.



Il est 19h et on reprend la route pour les 30 km qu'il nous reste avant d'arriver au camping. C'est un peu long vu l'heure, mais la route est principalement en descente. Et spectaculaire! C'est immense! Magnifique! Je voudrais pouvoir inventer des mots car j'ai l'impression qu'ils n'expriment pas assez l'imposante beauté du lieu. La lumière du jour déclinant ne fait qu'ajouter une touche irréelle au tableau. On est tous les trois complètement estomaqué pendant cette descente. C'est clairement un des plus beaux paysages que j'aie vus dans ma vie et peut-être bien ma plus belle étapes à vélo à ce jour.




Après cette fabuleuse descente, on arrive dans un camping infesté de moustiques. Ils nous avaient plus ou moins laissés tranquilles depuis qu'on est en montagne, mais ici ils sont présents en force. Rien à voir avec ce que j'ai vécu au lac Lasalle, mais suffisamment pour me décider à revêtir mes atours anti-moustiques: filet, gants et vêtements de pluie. Marco et Angela rient en me voyant affublé de la sorte, mais deux minutes plus tard, ils m'imitent. Le rituel de la gourdouche s'en voit un peu écourté et expédié, ce qui me fera passer une nuit moyennement bonne, restant toujours un peu poisseux de sueur et de crème solaire dans mon sac de couchage. Il fait encore plus frais que la veille.

3 commentaires:

  1. évidemment, les marmottes, ça le fait moins que les grizzlis, mais pour les câlins, c'est peut-être plus sympa! Quel spectacle fabuleux! et encore, on n'en voit que des photos. Bientôt le Montana. Je téléphone à Buddy (ou plutôt à Chinook) pour prévenir de ton arrivée. bisous

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    1. Il faut vraiment que tu te décides à venir faire un tour ici, Ne. J'ai beaucoup pensé à toi au milieu de ces montagnes. Tu adorerais!
      Nisous

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  2. Non, non, je confirme: tu n'as pas une tête à faire un planning!! Trop marrant! Bizz

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