jeudi 9 août 2012

 
Alberta - Dans la prairie

Je sors maintenant complètement des montagnes en parcourant les 25 km restants pour rejoindre la Highway 22, plus connue sous le nom de Cowboy Trail. Là, je crois que c'est bon, pas de place au doute, on y est. Tout ici rappelle les cowboys: les immenses étendues de prairie, les chevaux, les vaches, les ranches, et au cas où on serait distrait, un cowboy géant dans un champ.





Encore une fois, le changement est radical. La route sinue à perte de vue entre les collines couvertes d'herbe et battues par le vent. Car il est bien là et fait également partie du décor. Il souffle fort et je l'ai de plein côté gauche. Avec mon chargement qui offre une grande surface de résistance, je dois bien tenir mon guidon car les rafales me déstabilisent et j'ai du mal à avancer. Je dois de temps en temps regarder mon compteur pour me persuader que je progresse car devoir pédaler en descente en plus d'avoir cette prairie à perte de vue n'aide pas à s'en rendre compte. Ceci dit, j'aime beaucoup ce paysage vierge et vert, et heureusement, le vent est chaud.


J'arrive bien crevé vers 16h en vue d'un camping sur le bord d'un lac, Chain Lakes. Je m'arrête pour évaluer la distance au prochain camping et si je suis capable de la parcourir maintenant. Les cartes que j'ai ne sont pas très précises, mais il me semble un peu trop loin. A ce moment, un gars arrête son pick-up à ma hauteur et me demande si j'ai besoin d'aide. Je lui explique mon dilemme et il me confirme que le camping est à 3 heures de vélo. Il a déjà fait la route. Mais pendant qu'on parle, j'ai du mal à me concentrer sur ce qu'il dit et me focalise malgré moi sur sa manière de s'exprimer, qui me procure un sentiment bizarre de déjà-vu. Il est clairement d'ici, mais a un gros accent à couper au couteau qui me rappelle quelque chose. C'est très paradoxal. Je continue plus ou moins à l'écouter quand... Ca y est, je sais! Il a un gros accent flamoutche et ça me rappelle Belgacom. Véridique! Je n'y comprends rien, c'est quoi cette histoire? Il me demande alors si je suis de Calgary, alors que je doute très fort avoir l'accent du coin. On reste dans l'étrange... Je réponds que non, je viens de Belgique. "Oh moi aussi!", me répond-il. Ben voilà, tout s'explique! Et là, fabuleux, il me dit mot pour mot: "Allè, I immigrated 25 years ago, hé." Terrible! J'ai envie de rire, mais de rire. Ca fait 25 ans qu'il est ici à parler anglais et il ponctue toujours ses phrases de allè et de . Génial!

Sur ce, je me dirige vers le camping où il me rejoint pour papoter. On en reste à l'anglais, car je n'ai pas envie de parler flamand, déjà... Et en plus, il continue en anglais. On discute un peu puis il s'en va après m'avoir dessiné le plan d'un gars chez qui je pourrais aller dormir demain, d'après lui. Mais ça ne m'emballe pas trop de me pointer comme ça chez cette personne alors que je ne sais pas qui c'est et que j'ai besoin de faire une lessive, de recharger mes appareils électroniques, d'accéder à Internet, de me laver les cheveux, etc. La totale, quoi. Je serais trop mal à l'aise de me taper l'incruste de la sorte. Je préfère les rencontres fortuites comme toutes celles que j'ai faites jusqu'à présent.

Le lendemain, je me lève à 7h car la veille au soir, le vent est tombé. J'ai donc pris le pari, pour ce qu'il vaut, que le vent ne se lève que quand il commence à faire chaud et de tenter le coup de partir tôt pour l'éviter le plus possible. Avant de partir, mon voisin vient me parler car il est intrigué par mon vélo immatriculé en Alaska. Je lui explique mon voyage, qu'il trouve génial. Puis, il m'explique d'où il vient et qu'il travaille dans un ranch. Et là où moi, j'aurais tout juste pu dire avec tout le rêve, la poésie et le prestige que ce métier confère: "Je suis consultant en informatique", lui me lâche simplement d'une voix grave: "I'm a cowboy..." C'est génial! J'aurais tant aimé qu'il ponctue sa déclaration d'un gros glaviot noir fièrement craché à terre.

Après cette rencontre avec mon premier cowboy, je pars à 9h et il n'y a pas un pet de vent. J'ai du bol ou j'avais raison? J'ai visiblement beaucoup de bol car le vent ne se lèvera pas de la journée, si ce n'est un léger vent de dos qui va bien m'aider. C'est la contrepartie que mon chargement offre servant alors de voile et m'aidant parfois à tracer à presque 30 km/h à plat. Impeccable! Et je confirme pour le bol car je vois plusieurs panneaux qui indiquent de faire attention aux rafales de vent extrêmes.






Ces conditions me permettent de profiter au maximum du paysage. Les prairies immenses me procurent un tel sentiment de liberté que c'en est grisant. J'adore! Je peux voir d'un point surélevé la route s'étirer sur au moins 20 km en ligne droite devant moi. Impressionnant! Heureusement que le vent est mon ami aujourd'hui, sinon ce bonheur se serait transformé en calvaire. J'imagine sans peine les Indiens de l'époque parcourir ces immensités sur leur chevaux et le plaisir qu'ils devaient éprouver. Jusqu'à ce que les Blancs viennent foutre leur merde, évidemment. Maintenant, ils sont cloisonnés dans des réserves où ils ont tout juste le droit de la fermer en sombrant dans l'alcool et la misère. C'est l'aspect du Western actuel qui n'est pas chouette à voir du tout!


J'arrive à Pincher Creek à 15h sous 34 °C, après avoir parcouru 110 km en 5h30, ce qui est une toute bonne performance, et avoir bu presque 5 litres d'eau. Une jolie poupée aux yeux magnifiques y a d'ailleurs contribué en s'arrêtant sur le bord de la route pour me tendre un litre d'eau fraîche. Super sympa! Elle me confirme également que j'ai beaucoup de chance avec le vent car il est très fréquent que des semi-remorques se fassent balayer de la route. Ah oui, tiens?

Je m'installe au camping municipal et décide d'y rester également demain. Je n'ai plus pris de repos depuis Prince George il y a deux semaines. Même si je n'en ressens pas le besoin, j'ai le temps et préfère prévenir que guérir. Allez, à la lessive!

7 commentaires:

  1. Hi Baldy! Avec tous ces gueuletons que tu te fais offrir, tu vas nous revenir tout grassouillet! Faudra que tu fasses un petit trek pour éliminer le surpoids! Et à force de parler de chopes, tu me donnes envie d'une Duvel, tiens. Bientôt le Montana.Ménage ton palomino et fais la bise à Comanche. Je vais me glisser incognito dans tes fontes pour vivre la suite avec toi. Du moment que c'est toi qui pédales...Bisous

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  2. Ahah ça roule!
    Ne t'en fais pas, je dépense quand même toujours plus de calories que je n'en ingurgite. Mais ceci dit, en parlant de trek, j'ai acheté hier mon ticket pour le Népal. :) Départ le 1 octobre!! Tu viens, Ne?

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    1. on en reparle la semaine prochaine... dis-moi toujours sur quel site tu as acheté ton billet et le n° du vol

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  3. Et j'entre au Montana aujoud'hui!
    Chez les Black Feet!

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  4. Excellente moyenne : 110km en 5h30 avec tout ton matos, faut le faire !

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  5. Allé, tu peux un petit peu reposer, hé, ça est lourd, ton gourde, tes affaires sur ton bicyclette et tout ça... Reposer aussi tes jambes, car ils sont très exigés. Et pas op sur le route, allé, à bientôt.

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  6. Hello la fourrure.

    Vraiment super agréable de te lire, et pas trop de fautes d'othographe en plus... (La lecture...)
    Pour ta moyenne de vitesse, encore un petit effort et tu pourras venir avec nous rouler.
    Allez, continue de profiter de tous ces supers moments.

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