mardi 11 septembre 2012

 
Colorado - Le coloré

Première indication pour Denver. La fin approche...

Après deux nuits en Utah, je me dirige vers le Colorado. Ce matin, à cette idée, j'étais moins enthousiaste que lors des autres passages de frontière car celui-ci est le dernier et symbolise un peu la fin de mon périple. Mais lorsque j'arrive devant le panneau indiquant l'entrée dans l'état, quelle n'est pas ma joie de me rendre compte que je me trompais. Ce Colorado dont je parle pratiquement tous les jours aux gens que je rencontre, le voilà, il est là, juste devant moi. J'y suis! Je le vis bien plus comme un accomplissement que comme une fin et je ris tellement je suis content. Et le voyage n'est pas encore terminé vu qu'il me reste encore une semaine pour parcourir 600 km et un parc national à traverser. Encore des choses intéressantes au programme!


J'ai enfin le vent dans le dos! Ce vent du sud-ouest qui me souffle dans la tronche depuis une semaine, qui m'ennuie et me freine, maintenant que j'ai bifurqué vers l'est est devenu mon ami. Je m'arrête à Dinosaur où je rencontre un cycliste qui voyage comme moi, mais lui fait le tour des Etats-Unis en étant parti du Texas. On rigole car on se rend compte en partageant nos histoires qu'on est chacun un peu l'antithèse de l'autre. En effet, là où je cherche à traverser la nature et les parcs et réserves nationaux, il adore traverser les villes et évite de se retrouver trop perdu dans la nature. Il campe même en ville, caché derrière les maisons. De plus, il se nourrit de crasses. Comme il dit en riant: "Je suis un gars de la ville." Je l'ai d'ailleurs trouvé en train de manger un burger et son petit bide malgré 4 mois sur la route trahit son régime. Je lui conseille le Yellowstone, mais il préfère mettre le cap sur Salt Lake City. Chacun son trip!





Avec Barrett, two crazy guys on the road!
Je distingue à un moment donné, de mon côté de la route, une tache qui a l'air de grossir plus j'avance. Si c'est un cycliste, il est vachement lent. Mais je réalise assez vite que c'est quelqu'un qui marche sur le bord de la route. Qu'est-ce qu'il fout ici en plein milieu du désert? Je m'approche et j'ai tout de suite ma réponse: le même genre de truc que moi, mais à pied. Il s'appelle Barrett, est parti de Miami et va à San Fransisco en marchant. Terrible! Je lui fais part de mon étonnement vu qu'il a l'air frais comme un gardon, rasé de près, et ne transporte qu'un camel bag et son téléphone. Il est en fait suivi ou devancé par une voiture de ravitaillement qu'il retrouve le soir. Il a l'air plutôt pressé et reprend la route après qu'on a échangé nos coordonnées et avant que j'aie pu lui demander plus de détails sur son odyssée. Un truc sponsorisé, à mon avis. (Et en effet, je recevrai plus tard le lien de son site: http://gowalkamerica.org.)

Arrivé à Steamboat Springs, petite ville qui vit du ski en hiver, je me rapproche des Rocheuses que vais traverser pour rejoindre Denver. Par la même occasion, je reprends de l'altitude et le paysage change à nouveau radicalement de l'aridité à la verdure. J'ai d'ailleurs aujourd'hui une belle journée en perspective puisque j'ai un col à franchir à près de 2900 m, encore de quoi élever mon altitude maximale. La montée commence à 2000 m et un ou deux kilomètres avant de l'entamer, je me fais rejoindre par un cycliste qui ralentit à ma hauteur pour me demander avec stupeur si je viens vraiment d'Alaska. Il n'en revient pas, reste à mon niveau et on commence la papote en roulant.
Dan
Dan vit ici et est mécanicien sur les remonte-pentes. Il me demande plein de détails sur mon expérience tout au long de mon trajet, on parle de son pays, du mien, et pendant ce temps-là, on grimpe. Je lui dis après plus d'une demi-heure, étonné qu'il n'ait pas encore détalé, que s'il désire tracer et prendre le large, qu'il ne se gêne pas, je ne voudrais pas le retenir à mon allure de poids lourd. "Hors de question! Tu viens d'Alaska, ce n'est pas tous les jours que je vois ça, je peux bien t'accompagner jusqu'en haut!" Génial! Voilà donc Dan qui continue à adapter son rythme au mien, pédalant tout doucement pour rester avec moi, et ce pendant deux heures, temps qu'il nous faudra pour arriver au col. Il me donne des barres énergétiques et tout au long de l'ascension, on parle, on rit, on se raconte plein de trucs. Lors d'un break que je lui demande de faire à mi-chemin histoire de me détendre les jambes, il teste mon vélo et essaye de le soulever. Il est encore plus admiratif et s'esclaffe en ponctuant toutes ses exclamations d'un Son of a gun! que j'adore. Cette expression est terrible. Et donc, après deux heures de l'ascension la plus joyeuse que j'aie faite depuis le début, on arrive sans que je m'en rende compte au Rabbit Ears Pass, à 2873 m. Je l'ai à peine vue passer, celle-là. Il n'y a pas à dire, c'est bien plus difficile à faire tout seul. Merci à Dan d'avoir pris son temps avec moi. Encore une rencontre géniale!

2873 m
Dan redescend ensuite tandis que je continue la route, et j'ai immédiatement le sentiment d'avoir changé de saison. A cette altitude, les arbres se teintent déjà des couleurs jaunes de l'automne. Magnifique! Je ne m'attendais pas à déjà pouvoir assister à cela. Ce vrai qu'on est au début septembre et qu'ici l'hiver peut arriver la semaine prochaine. Je suis content d'être à nouveau en environnement montagneux et en retrouve avec grand plaisir les paysages spectaculaires.







Je continue ma descente pour m'arrêter sur les bords du Wolford Mountain Reservoir où je campe et me lave dans le lac, enfoncé dans la vase jusqu'à mi-mollets.



Le lendemain matin, je prends le temps d'échanger mes pneus avant et arrière comme je l'avais déjà fait au Canada. En effet, le pneu que j'avais acheté à Prince George est maintenant, après 3500 km de bons et loyaux services, à son tour complètement usé jusqu'à la corde. Le pneu avant, quant à lui, ne s'use presque pas et est toujours intact. Durant l'opération, un bout de fil de fer logé inoffensivement dans le pneu avant depuis peut-être plusieurs semaines en profite pour faire son petit trou et m'offrir une crevaison en prime. Bon, il s'agit de faire gaffe, je n'ai plus de chambre à air de secours.



3 commentaires:

  1. allez, ta bécane aura bientôt droit à un repos bien mérité! Toi, par contre... Fin d'un premier chapitre exaltant, enivrant, chargé d'émotions et d'images inoubliables.. Je suis très heureux que tu aies pu le mener à bien avec un enthousiasme "inébranlé". Et je suis tout aussi heureux d'entamer le deuxième avec toi. L'Himalaya nous attend de pied ferme! Bizz

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  2. Wouah, quels paysages! Ça doit être super de faire tout ça à vélo (nous on est des grosses fégnasses en bagnole)...
    Et didonc, quelle belle barbe!

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  3. Ils savent choisir les noms des restos par là-bas ;)

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